Enfin un billet où on parlera de bière, de femmes et de mauvaises herbes.

Le Rhin le Rhin est ivre où les vignes se mirent
Tout l'or des nuits tombe en tremblant s'y refléter
La voix chante toujours à en râle-mourir
Ces fées aux cheveux verts qui incantent l'été

Strasbourg, enfin. Trois jours, seulement.

Comme j'avais peu de temps, je me suis imposé un parcours de haut niveau : un premier soir marathon avec les Brasseurs, la Lanterne et le Nelson. Le deuxième soir aux Brasseurs et au Trolleybus, le troisième à la Lanterne et de nouveau le Trolleybus pour la dernière après-midi. Parmi les classiques, seul a manqué au tableau le Troc-Café.

J'aime de plus en plus le Trolleybus, je l'ai beaucoup fréquenté cette année mais finalement pas assez à mon goût. La sélection sonore y est presque aussi excitante qu'à la Lanterne et la serveuse presque aussi jolie. Presque seulement car ma préférée reste quand même celle de la Lanterne, je suis si amusé par le décalage entre sa grande beauté et son peu de photogénie. Voilà trois photos que je prend d'elle et aucune n'a su retranscrire correctement ses traits gracieux.

Cependant, un malaise. J'ai quitté Stras insouciant, ayant connu deux saisons pleines d'amour et de câlins, si comblé que j'en avais oublié à quel point cette ville est un supplice pour les célibataires. Les filles y sont nombreuses, belles, sophistiquées, bourgeoises, métissées... Elles grouillent dans les parcs publics, se faufilent dans les restaurants, s'affichent dans les cafés. Je n'ai pas trouvé d'autre moyen d'y échapper que d'ôter mes lunettes pour les donner à mon ami Jérôme qui avait lui aussi besoin de brouiller sa vue. Le retour à Bayonne fut heureusement salvateur.

Je ne suis pas allé à Seegmuller. La tentation fut grande mais des faisceaux ont placé une barrière métallique de deux mètres cinquante, physiquement facile à contourner mais esthétiquement repoussante. Je ne pus donc m'approcher du site.
Je me consolai de fort belle manière en pique-niquant entre le Rhin et le port, aux abords de la raffinerie de pétrole, bundieusement, avec Patrice, de la bière et du saucisson. L'autre grand moment fut la traversée de l'agonisant Pont Churchill, qui se bonifie avec le temps. La nature y reprend déjà ses droits, déjà... Elle commence par envoyer ses fantassins chardons et orties pour établir des avant-postes, les ronces sont sur le pied de guerre, bientôt viendront les baobabs et la victoire sera totale.
Je ne sais pas ce qui m'a retenu de descendre dans les piles creuses actionner le détonateur.

Et lorsque je quittai Strasbourg, ce coup-ci pour très longtemps, je vis dans les reflets argentés de l'Ill les neiges grises d'Helsinki, mon baladeur crachait le martèlement industriel de Last orders des Arab Strap et j'eus le cœur si gros que je craignis qu'on me fît payer une taxe d'encombrement au last check de l'aéroport.