Rappel du contexte : je fais ma dernière année de mastère d'école supérieure de commerce à la Business School d'Helsinki, entouré d'étudiants européens.

Il m'est impossible de cacher que je suis français

A peine, j'ouvre la bouche que tous reconnaissent mon accent si sexy. De toute façon, renoncer à parler serait vain car il y aura toujours quelqu'un dans l'assistance (une fille généralement, allez savoir pourquoi) pour me demander tout de même si je le suis. En effet, je ressemble à un français (ou du moins, au français créé par l'imaginaire des peuples européens) : mes cheveux longs, ma barbe naissante, mon air à la fois décidé et rêveur... tout ceci me dénonce.

Il serait ridicule de cacher que je suis français

J'ai omis de vous dire que c'est en français qu'on m'aborde, un français hésitant et peu clair, un français de LV2. Je suis étonné de découvrir à Helsinki le nombre d'étudiants parlant cette langue et aimant la parler. Ceux ne le pratiquant pas ne sont pas en reste car ils aiment placer quelques phrases en ma présence. Oh! presque rien, des "bon appétit", des "merci beaucoup". Juste des petites phrases qui trahissent un intérêt enjoué.

Vue de l'extérieur

Les étrangers ont un regard sur la France que les français eux-même se défendent de porter. Les rares qui ne sont pas encore venus faire de la villégiature dans l'hexagone projettent de le faire. Tous ont vu et apprécié un film français. Combien de jeunes français ont déjà vu un film allemand ?

Mardi, la coiffeuse me demande elle-aussi si je suis français, j'acquiesce. Elle soupire : "Comme vous êtes chanceux !". Et bien, figurez-vous madame que je l'ignorais.

Chaque jour, je constate la présence culturelle et économique française. Des affiches omniprésentes vendent un spectacle de Jean Cocteau sur des panneaux JCDecaux. Les grandes surfaces sont remplies de produits français présentés tels quels, seul un petit autocollant en Finnois vient informer le consommateur finlandais de la nature du produit. Ces produits sont les plus chers, dans un pays où la vie est déjà très chère, mais ils promettent un certain "art de vivre".

Dans le port, alors que j'entends un orchestre de rue jouer l'Été indien, je constate que beaucoup de choses sont écrites en cette langue. Les bâtiments administratifs que j'ai pu voir ont leurs écriteaux en finnois et en suédois évidemment, mais aussi en anglais et en français.

Vue de l'intérieur

Cependant, en lisant les éditions en ligne de nos journaux nationaux, je ne cesse de lire les discours sur l'éternelle décadence de la France (un journal en particulier se plaît à propager ce genre d'idées douteuses mais il n'est pas nécessaire que je précise ici lequel). Une frange du paysage politique s'épanouit en cultivant chez le peuple français la culpabilité, la peur et la nostalgie d'une époque mythique.

C'est peut-être payant électoralement mais ça me semble n'être rien d'autre qu'un vilain mensonge.