En tant que "gars qui s'y connaît en informatique", je suis souvent sollicité par mon entourage pour expliquer mes choix technologiques, notamment en ce qui concerne les logiciels des ordinateurs et des téléphones.

Pour les ordinateurs, c'est GNU/Linux, évidemment. Pour les téléphones, parmi les quatre principaux systèmes disponibles, je choisis Android. Pourquoi ?

1. Utiliser son téléphone sans contraintes

Ah ! Les smartphones ! Ces petits ordinateurs qu'on amène partout avec nous. C'est fantastique. Vous achèteriez un ordinateur sur lequel vous ne pourrez pas choisir et installer librement vos applications ? Non, j'ose espérer. Alors pourquoi accepter ça sur son téléphone ?

Sur Android, la place de Google Play est importante certes, mais ce n'est que l'un des multiples moyens de se procurer une application. Il y a de nombreux magasins concurrents, mais surtout on peut installer des applications hors magasin, il suffit d'avoir le fichier accessible quelque part.

Par exemple, Jean a conçu pendant son temps libre une petite application pour monitorer ses sauts de chute libre. Elle a été appréciée dans son club, il l'a donc partagé par e-mail avec ceux qui en ont besoin. C'est ce que les amis fonts. Il créent, ils partagent. Librement, sans demander la permission à personne, et surtout pas à une autorité qui contraint arbitrairement nos usages, qui prétend définir à notre place ce qui est correct et ce qui ne l'est pas pour notre vie numérique.

Parce que chez le principal concurrent, ce n'est pas très joyeux. La concurrence ? Malvenue évidemment. Les logiciels libres ? Que s'ils ne le sont pas trop... Le retrogramig ? Les téléchargements Torrent ? Interdits ! Pas de porno non plus ? C'est qu'il est prude en plus l'animal !

Et puis, comme dans la vraie vie, avoir accès à plusieurs fournisseurs, c'est sain, ça permet de faire jouer la concurrence et de ne pas subir des prix abusifs. Un exemple : DavDroid est trop cher sur le Play Store ? On le trouve (légalement, évidemment) gratuit sur F-Droid.

N'oubliez pas que vous avez acheté votre smartphone. Il vous appartient désormais, pleinement et inconditionnellement, il n'appartient plus à son fabricant. Ou alors c'est du vol.

2. Choisir le matériel qui nous convient

Un constructeur qui fait du bon matériel à tous les coup, ça n'existe pas. Ni Samsung, ni LG, ni Apple, ni Motorola ou HTC ne sont magiques. Tous les fabricants de matériel ont leurs bons produits et leurs échecs, leurs bonnes périodes et leurs coups de mou. Être pieds et mains lies à l'un d'entre eux est une très mauvaise idée.

Et puis, au delà de la qualité (quasi-)objective du matériel, il y a les besoins subjectifs et contradictoires à satisfaire. Vous y croyez, vous, au fantasme du constructeur qui répondrait avec un seul produit pile-poil aux besoins de tout le monde ?

Par exemple, quand j'étais un jeune cadre dynamique, je voulais un téléphone compact et esthétique, et j'avais un Nexus 4 de LG, un excellent appareil. En ce moment, je voyage beaucoup, pendant longtemps. J'ai donc un Gionee Marathon M3, qui est plus volumineux et moins élégant, mais qui est robuste, qui a une autonomie extraordinaire (je le recharge tous les 4 jours) et qui accepte 2 cartes SIM à la fois. Parfait pour la vadrouille !

Et mon prochain téléphone ? Je ne m'en fais pas, j'aurai le choix entre des milliers de modèles, crées par des centaines de constructeurs et tous différents. Ou alors je me concocterai le mien.

Les utilisateurs de smartphones se divisent entre ceux qui ne jurent que par les petits écrans (jusqu'à 4 pouces) et ceux qui sont adeptes des grands écrans (au delà de 4 pouces).

Imaginez donc un système qui serait totalement dépendant d'un seul constructeur (imaginez…) et que le dit constructeur refuse pendant des années de produire des téléphones à grands écrans, malgré les demandes des consommateurs. Puis, un jour, son PDG meurt, et il décide soudainement de ne produire plus que des téléphones à grands écrans, désormais au dépend de ses autres utilisateurs. Ça serait curieux, non ?

Croire que le One Size Fits All peut répondre dignement à ses propres besoins, c'est de l'autodépréciation, c'est triste. Think different !

3. S'approprier son expérience utilisateur quotidienne

Je l'admets, il y a souvent de quoi être étonné, parfois décontenancé, devant la diversité des écrans Android. Pour ceux qui sont habitués à avoir tous les mêmes icônes, (presque) tous la même sonnerie, et jusqu'il y a pas si longtemps tous le même fond d'écran, il peut sembler qu'il n'y a pas deux interfaces Android pareils au monde. C'est presque le cas, oui.

Android propose par défaut une interface (on dit "un launcher" dans le jargon) à la fois simple, esthétique et puissante, qui conviendra au plus grand nombre. Mais vous savez à tel point les êtres humains sont divers dans leurs goûts et leurs préférences, c'est fou ! Il est donc très aisé de changer complètement l'apparence de son téléphone.

Par exemple :

  • Aviate de Yahoo permet d'organiser ses applications et widgets par catégories et son affichage s'adapte selon le moment de la journée
  • Nova est très personnalisable tout en restant performant
  • Buzz propose des thèmes tout faits très élaborés
  • Hexy permet d'avoir toutes les applications sur un seul et même écran, sous forme d'une grille hexagonale, rangées par couleur (!) et par fréquence d'utilisation (c'est celui que j'utilise en ce moment)

Sans oubliez les launchers officiels de Google, Facebook, Nokia ou Microsoft si on tient a avoir a une expérience très intégrée avec les services de ses sociétés, ce qui n'est pas trop mon truc.

Lors de mes voyages en Asie, c’était un vrai bonheur de voir à quel point les gens, les filles surtout, avait personnalisé leurs téléphones à leur gout, avec parfois beaucoup de créativité. Alors, oui, c'est moche parfois. Super girly, super fluo ou super kitsch... des fois les trois ! Mais l'important c'est que ça soit beau aux yeux de la personne qui passe plus de 3 heures par jour sur l'appareil, à y vivre sa vie numérique et à communiquer avec le monde. Il n'y a pas qu'une seule beauté.

Pour un utilisateur, penser qu'une seule interface, qu'une unique manière d'organiser l'information et les services d'un système aussi complexe qu'un smartphone, peut convenir à tous, c'est naïf. Pour un designer, aussi doué soit-il, c'est présomptueux. Pour une entreprise, ça peut relever d'une vision totalitaire de l'informatique. Pouvoir changer l'interface n'est pas qu'un caprice esthétique, c'est respecter l'utilisateur en lui donnant la possibilité de personnaliser, de s'approprier son précieux outil.

Et vous connaissez l'histoire de celle qui détestait le flat design ? Elle détestait le flat design, et puis bim-bam-boum !

4. Accéder pleinement et librement à ses fichiers

En utilisant un ordinateur ou un smartdevice, on produit une quantité considérable d'informations personnelles, et celles-ci doivent bien évidemment nous être accessibles et sous notre contrôle.

La difficulté de gérer sa production de données peut conduire à de biens étranges comportements. Je vois souvent des utilisateurs de systèmes concurrents à Android s'envoyant des e-mails à eux-mêmes pour transférer leurs fichiers, ou faisant des captures d'écrans pour conserver une information, ou alors notant un nouveau contact dans le bloc-notes plutôt que dans le carnet d'adresse. Bref, choisissant à chaque fois de manipuler des données moins structurées, moins valorisées, donc moins utiles, mais sur lesquelles on a bien daigné leur laisser un peu de contrôle.

Je me moque, je me moque, mais moi mème, propriétaire d'une tablette Apple qui me sert à composer de la musique, je galère aussi pour pouvoir avoir accès de façon aisée et fiable, en import et en export, à ma production musicale.

Sur Android, on peut accéder à son dossier personnel en MTP (toujours, comme les appareils photos) et UMS (souvent, comme les clefs USB), deux standards universels. Vous branchez, ça fonctionne, partout, tout le temps, sans craindre une éventuelle purge de vos données personnelles. Très pratique pour partager ses fichiers avec les amis, pour utiliser son téléphone comme support de stockage, ou pour faire des sauvegardes locales et maitrisées de ses données.

Et il est évidemment possible d'organiser ses fichiers depuis l'appareil lui-même avec un explorateur de fichiers. Révolutionnaire, non ?

Conclusion

A ma grande surprise, achever l’écriture ce billet m'a laisse un goût bien amer. J'y ai cite ces 4 libertés (choix des apps, choix du matériel, personnalisation de l'interface et accès aux fichiers) comme des avantages concurrentiels certains, et je me suis soudain rappelé qu'il y a encore peu elles étaient des évidences pour tous et la « lutte » concernait des libertés bien plus progressistes :

  • La liberté d'exécuter le logiciel, pour n'importe quel usage ;
  • La liberté d'étudier le fonctionnement d'un programme et de l'adapter à ses besoins, ce qui passe par l'accès aux codes sources ;
  • La liberté de redistribuer des copies ;
  • L'obligation de faire bénéficier à la communauté des versions modifiées.

On s'en éloigne ! J'ai le sentiment que le succès des smartphones, surtout celui d'une certaine marque, a tiré l’éthique de l'industrie vers le bas. Cependant, aujourd’hui, il est tout de même possible d'avoir une vie numérique digne sur son mobile et Android est le meilleur choix que nous avons (parmi les 4 "grands").