On me rend la monnaie et l'un des billets semble taché. Je le défroisse : Andrew Jackson me dit de voter pour Bernie (et aussi de "tamponer l'argent hors de la politique").

Les billets de banque, donc, les voitures (autocollants sur les carrosseries et plaques d'immatriculation personnalisées), les t-shirts et les casquettes, bien sûr, les poussettes, parfois, les pancartes dans les jardins et sur les palissades... C'est étonnant et rafraîchissant de voir à tel point les américains affichent sans complexe leur affiliation politique. Bernie Sanders surtout, mais aussi Hillary Clinton et Donald Trump.

Ce n'est pas seulement la campagne présidentielle qui poussent les citoyens à une telle propagande. Dans le quartier de Travis Heights à Austin, les jardins et palissades se disputaient concernant le vote du 7 mai sur la régulation de l'activité des sociétés de VTC Uber et Lyft. Ici, à Philadelphie, c'est le vote concernant la fermeture du tribunal spécifiquement dédié aux contraventions routières qui déchaîne les passions. Deux référendums locaux.

Car les américains votent beaucoup. On se moque de leur abstention très élevée (et encore... je n'ai pas vu les chiffres), mais ils sont sollicités en permanence : ils élisent les pouvoirs législatifs et exécutifs fédéral et étatique, le pouvoir exécutif local (sur deux niveaux), un peu comme nous. Mais aussi parfois directement le maire (en plus du conseil municipal), et surtout le pouvoir judiciaire local (juges et shérifs). Et puis, ces nombreux référendums...

De toute manière, le vote n'est qu'une des nombreuses expressions de la démocratie et, s'il est le plus visible, il ne doit pas occulter les autres. La démocratie ne s'exprime pas seulement certains dimanches après-midi pluvieux, mais tous les jours par nos pétitions, réunions, associations, manifestations, grèves, publications... Et les américains n'ont rien à nous envier de ce côté.

Bref, c'est avec beaucoup d’intérêt et de plaisir que j'écoute mes rencontres et mes voisins de table parler de politique. Enfin... jusqu'au terrifiant moment où ils se tournent vers moi et me demandent : Et toi, tu penses quoi de Donald Trump ?